La guerre est (officiellement) terminée au Liban, même si Israël continue de bombarder le Sud-Liban, en violation du cessez-le-feu. Alors qu’un autre cessez-le-feu, entre Israël et le Hamas, a été signé, c’est l’occasion pour Mouais de revenir sur le combat de celles et ceux qui se sont entêtés à nourrir le pays malgré les bombes, alors qu’Israël bombardait champs, usines et ports de pêcheurs.
Reportages de Pluto pour Mouais
Buzuruna Juzuruna
La ferme agroécologique Buzuruna Juzuruna (“Nos Graines sont Nos Racines »), dans le centre de la vallée de la Bekaa, s’est mobilisée de plein pot pendant les deux mois et demi qu’a duré l’offensive israélienne dévastatrice contre le Liban. Ses membres, français, syriens et libanais ont non seulement envoyé des tonnes de nourriture aux cuisines solidaires qui nourrissaient les 1,2 millions de personnes déplacées par le conflit, mais hébergeaient aussi un couple d’artistes de Baalbek et un agriculteur du Liban-Sud. En plus, ils ont préparé leur « librairie de semences » en cas de coup dur : si un blocus israélien total venait créer une famine comme à Gaza, leurs milliers de graines traditionnelles et locales permettraient de nourrir tout le Liban.
⬆️ Walid Youssef, co-fondateur syrien du collectif, montre la « librairie de semences », avec des exemplaires de semences dans une boîte prête à être cachée dans un lieu sûr en cas de bombardement sur la ferme, pour les préserver.
⬆️ Le chapiteau iconique du cirque associatif Bou Laban, sur les champs de Buzuruna Juzuruna.
⬆️ Walid Youssef et sa famille nettoient et trient des lentilles que le collectif va envoyer aux cuisine solidaires à travers le Liban pour nourrir les personnes déplacées par la guerre.
⬆️ Charlotte Joubert, cofondatrice française du collectif, est rentrée en France pendant la guerre à cause du danger.
Subsistance dans la haute-Bekaa
Pendant l’offensive israélienne contre le Liban, la vallée de la Bekaa a été fortement bombardée. Ce grenier du Liban produit les deux-tiers de ses fruits et légumes : les bombes israéliennes ont mis en péril l’agriculture et la subsistance du Liban. Malgré le danger quotidien, des agriculteurs et artisans sont restés sur place afin de continuer leur métier et de nourrir le Liban.
⬆️ La nurserie de plantes de Buzuruna Juzuruna.
⬆️ Ali Diab Wehbe, agriculteur dans le village bombardé de Chaat (à quelques kilomètres de Baalbek), reste sur place malgré la mort d’une vingtaine de ses chèvres dans un bombardement israélien contre la maison de ses voisins.
⬆️ Destructions causées par des bombes israéliennes dans la banlieue de Baalbek.
⬆️ Les dommages causés par un missile israélien à quelques mètres seulement des ruines romaines de Baalbek, monument classé au patrimoine mondial de l’UNESCO.
⬆️ La femme d’Ali Diab Wehbe, elle aussi agricultrice sur cette ferme familiale à Chaat, a refusé de quitter leur village.
⬆️ Des artisans continuaient de confectionner des « sfihas » (petites galettes à la viande épicée), une spécialité de Baalbek, alors que la ville se faisait bombarder quotidiennement.
Subsistance dans le Sud-Liban
Lors de l’offensive israélienne contre le Liban, le sud du pays a payé le prix fort. Bombardé sans relâche, des centaines de milliers de personnes ont laissé leurs maisons, leurs collines et leurs champs derrière elleux. 2000 hectares de zones arables et 65 000 oliviers auraient brûlé sous les bombes à phosphore blanc et incendiaires, un véritable écocide. Pourtant, là aussi, certain.e.es se sont entêtées à rester sur place, dignement, sobrement, avec résilience et fierté.
⬆️ À Saida, des pêcheurs bravaient l’interdiction israélienne de prendre la mer. Face à ce blocus, ils continuent de pêcher et alimentaient les marchés du sud en précieux poissons frais, une fierté locale.
⬆️ Michel Atoui, agriculteur bio de Maghdouché, un village chrétien près de Saida, reste sur ses terres malgré les ordres d’évacuation israéliens, et accueille trois familles de déplacés chez lui. « Une civilisation qui sépare l’humain de l’environnement se perd elle-même », dit-il
⬆️ L’école technique de Tyr est devenue un refuge officiel pour 700 personnes déplacées par la guerre, dès le 8 octobre 2023. Mostafa (en bleu) y vit depuis un an avec sa famille, cet agriculteur a tout perdu lorsqu’Israël a bombardé sa ferme dans un village le long de la frontière. Mais grâce à Mortada Mhanna (en noir), coordinateur de l’aide humanitaire à Tyr, lui et d’autres déplacés ont planté un potager autour de l’école, permettant d’alimenter les familles déplacées.