Le conseil des ministres a validé ce mercredi 13 septembre la prochaine nomination d’Hugues Moutouh (celui des « deux claques et au lit » pour les révoltés des banlieues) en tant que préfet des Alpes-Maritimes. Le Poing, média ami montpelliérain avait, lors de son départ de l’Hérault, où il était auparavant, fouillé dans ses archives pour une rétrospective des faits d’armes douteux de ce préfet pas commode, entre expulsions brutales, traque des étrangers et accointances avec l’extrême-droite. On va bien s’amuser…
Un article initialement paru sur le site de nos camarades du Poing, qui nous ont aimablement autorisé à le reprendre afin que les Alpes-Maritimes puissent savoir à quoi s’attendre.
C’était en juillet 2021. Dans notre article, « changement de préfet dans l’Hérault, du pareil au même en pire ? », nous dressions déjà un portrait d’Hugues Moutouh, qui arrivait tout juste dans le Clapas. Haut fonctionnaire, proche de Sarkozy, et partisan d’une répression accrue des mouvements sociaux avec une police au corps à corps des manifestants et des ouvertures d’informations judiciaires contre X en amont des manifestations, il s’est fait connaître quelques mois plus tard sous le surnom de « préfet bulldozer ».
Expulsions brutales et traque des étrangers
À peine arrivé, Hugues Moutouh se lance dans un de ses premiers chantiers : l’expulsion des bidonvilles de Montpellier, à la suite d’incendies ayant touché ces habitats de fortunes, avec des opérations parfois jugées illégales par diverses associations qui militaient pour l’amélioration des conditions de vie des habitants de ces lieux. « C’était la première fois en conférence de presse que j’employais l’expression « politique de la terre brulée », c’est fort comme mots, mais ça le caractérisait… », se rappelle aujourd’hui Sophie Mazas, référente de l’antenne héraultaise de la Ligue des droits de l’Homme.
La même méthode d’expulsion brutale, à grands coups d’engins de chantier, sera employée contre les occupants de la ZAD du LIEN, qui s’opposaient à la construction route jugé « écocidaire », et controversé jusqu’au sommet de l’État.
Dans le même temps, le préfet de l’Hérault fait expulser des familles albanaises vivant dans un squat, malgré des relogements prévus par la mairie, des demandes de droit d’asile en cours d’examen, et un accompagnement validé par… la préfecture.
En octobre 2021, en plein sommet Afrique-France à Montpellier, des associations et collectifs organisent un contre-sommet et une manifestation pour la régularisation de tous les sans-papiers. Mais voilà qu’Hugues Moutouh fait arrêter en gare de Montpellier des militants de la Coordination nationale des sans-papiers, descendus de Paris pour l’occasion.
À noter cependant un léger revers : le « Moutouh-land » a tangué en février dernier, quand, au tribunal administratif de Montpellier, la rapporteuse publique a rejoint les défenseurs des droits de l’Homme pour que le préfet de l’Hérault modifie son dispositif d’accueil des étrangers.
En effet, plusieurs associations d’assistance aux étrangers et de défense des droits de l’homme (LDH, CIMADE, GISTI, association et syndicat d’avocats) avaient assigné le préfet pour qu’ il daigne respecter un avis du Conseil d’État rendu le 3 juin 2022 concernant l’obligation faite aux étrangers, dans l’Hérault, de solliciter un rendez-vous exclusivement par voie digitale, dématérialisée (l’Internet), pour effectuer la démarche à laquelle ils sont tenus ; démarche qui consiste à venir déposer en personne leurs demandes de titre de séjour – cela y compris de simple renouvellement, pour des étrangers déjà détenteurs de ce titre, le plus légalement et régulièrement du monde. Finalement, le tribunal n’a pas suivi l’avis de la rapporteuse – fait rarissime -, mais l’avis constituait déjà pour les associations mobilisées une petite victoire en soi.
Dérapages (in)contrôlés
En plus d’être un « bulldozer », Hugues Moutouh est un personnage très médiatique, qui s’exprime largement sur les réseaux sociaux et dans les médias, en témoigne sa dernière sortie chez nos confrères de France Bleu, au moment des émeutes qui ont suivi la mort de Nahel, où il donnait des conseils aux familles des jeunes qui descendaient dans la rue, avec son fameux « deux claques et au lit ! ».
Toujours du côté immigration (décidément…), on se rappellera d’un Tweet, dénonçant “la délinquance des SDF étrangers”, en ciblant “Algériens et Marocains en majorité”, avant d’ajouter “Les CRS ont instructions de ne pas les lâcher. Ils ne sont pas les bienvenus.” Un Tweet supprimé, après avoir été relayé et salué par Eric Zemmour, ainsi que par un syndicat policier héraultais.
Autre dérapage, durant l’été 2022, alors qu’il annonçait déployer plus de moyens policiers pour sécuriser le centre-ville : le préfet avait traité les SDF Montpelliérains de « Zadistes » dans les colonnes de la Gazette : « Depuis quelques semaines nous avons eu droit à quelques agressions de la part de SDF qui ont des profils un peu atypiques par rapport aux punks à chiens traditionnels du sud de la France. On a plutôt une population de zadistes qui est arrivée et qui sème le trouble. ».
Cocasse, venant de celui qui a lui-même fait expulser la ZAD du lien à grand coup de bulldozer. Alors Hugues, ils n’étaient finalement pas mieux dans les champs, loin du centre ville, les zadistes ?
Des liens troubles avec l’extrême-droite locale
Si Hugues Moutouh laisse défiler sans problèmes a fange la plus radicale de la fachosphère locale, emmenée par le groupuscule raciste et violent la Ligue du Midi, pour rendre hommage à Jeanne d’Arc, c’est bien « l’extrême-gauche » qui pose problème au désormais ancien préfet de l’Hérault. Car c’est sur ces bases d’appartenance politique supposée qu’il a fait interdire le 27 mai dernier une manifestation dénonçant l’apartheid Israélien, organisée entre autres par le Mouvement pour une alternative non-violente et par le Mouvement contre le racisme et l’amitié entre les peuples.
Plus troublant encore, pour celui qui est censé représenter la neutralité de l’État, de le voir s’afficher deux étés de suite en compagnie du maire d’extrême-droite Robert Ménard à une messe en ouverture des ferias de Béziers. On comprendra les observateurs locaux qui le qualifient de préfet « très politique » […]
EDIT : et de notre côté, à Mouais, on a bien hâte de l’accueillir !
E. B.
(L’llus’ par contre c’est Macko sur Paint)