« Siné », c’est un média qu’à gauche tout le monde aime aimer -et qu’une grande partie du milieu culturel de cette gauche française soutient, lui et son indéboulonnable et unanimement louée directrice Catherine Weil-Sinet. Mais derrière la façade d’une « famille » unie contre toutes les injustices se cache, chez les petites mains précaires du journal, « un mal-être généralisé à force d’être traitées comme une merde ». Enquête. Par Mačko Dràgàn
« Ce n’est jamais un plaisir de « tirer » sur son propre camp. Mais quand l’une des personnalités les plus influentes de l’audiovisuel « de gauche » adopte au quotidien des techniques de management dignes du patronat néolibéral le plus décomplexé, difficile de détourner les yeux » (1). Le journaliste Olivier Cyran, dans un article de 2013 pour feue la revue Article 11, évoquait ici le cas douloureux du pacha Daniel Mermet et de son émission Là-Bas si j’y suis, dont, après son éviction de la grille d’Inter, les déboires managériaux de la version en ligne ont à nouveau été épinglés, cette fois-ci par Arrêt Sur Images (2).
Et avec Siné Mensuel, inutile de dire que l’on touche également à un gros morceau. Un fleuron de cet esprit « Charlie » d’avant Philippe Val -à l’origine malgré lui de l’apparition du journal, issu du renvoi de Maurice Sinet, dit Bob Siné, du magazine « bête et méchant » pour « antisémitisme » (3)-, c’est à dire une hargne rigolarde, Hara-Kiriesque et volontiers libertaire vent debout contre tous les dominants, et soucieuse de donner la parole à toutes les victimes innocentes de l’infâme caca-pipi-talisme. Vraiment ?
Un journal « qui fait mal, et ça fait du bien » -ou pas.
Il y a de cela plus d’un an maintenant, suite à diverses pérégrinations sur les réseaux sociaux, j’apprends l’existence d’un mystérieux « Tutoriel secret » à destination des nouvelles recrues du journal, et au ton volontiers acerbe. M’étant procuré ce fameux document, j’y lis : « Bienvenue à Siné Mensuel, journal que tu admires depuis sa création pour ses positions marquées à gauche, la force de ses textes et l’insolence de ses dessinateurs. Ce tutoriel, mis à ta disposition gratuitement par ta prédécesseu·r·se incompétent·e, est destiné à t’expliquer les tâches de ce poste, te donner des indices et des conseils, et accessoirement », conclut-il de façon lapidaire, « à te convaincre de te désister tant qu’il est encore temps ».
Il fut donc possible un temps, de retrouver ces feuillets à sa prise de poste à Siné. Avec, chez les personnes recrutées, ainsi que l’indique une « fiche de poste » parodique circulant également et que nous nous sommes procurée, toujours le même profil : « Suffisamment dans la merde pour accepter tout ce qu’on lui demande sur une large palette de compétences ». Comme l’affirme Sacha*, l’une des personnes interrogées : « Ils recrutent à chaque fois les personnes super en galère, pour être sûrs qu’on ne bronche pas. »
Il faut dire que ce genre de choses est difficile à imaginer, quand on feuillette régulièrement, aux toilettes ou ailleurs, comme c’était mon cas, ce fort sympathique journal, créé donc par Siné dans la foulée de son renvoi, d’abord hebdomadaire, puis remplacé en 2011 pour raisons financières, par une version mensuelle qui paraît le premier mercredi de chaque mois, avec toujours cette devise : « Le journal qui fait mal et ça fait du bien. »
Parmi les signatures que l’on y retrouve plus ou moins régulièrement, rien de moins que la fine fleur de ce que le monde culturel et médiatique français compte de gauchos, comme Philippe Poutou et Aurélie Trouvé (qui ont participé au numéro « SOS » en novembre 2022), les humoristes Constance, Guillaume Meurice et Charline Vanhoenacker, l’éditeur Serge Quadruppani, le dessinateur Lindingre, ou encore le camarade anarchiste Yannis Youlountas, leurs contributions, « gratos » dans le cas de Guillaume et Charline, ainsi qu’il me l’avait confié(4), côtoyant des enquêtes sur la souffrance au travail, les luttes sociales, le sort des personnes exilées, des sans-abris, et de manière générale tous ces précaires qui en chient.
« Siné Mensuel, c’est de la mauvaise herbe. De la tenace, de l’imbouffable, jamais traitée parce qu’intraitable, élevée dans le plein vent des idées non-conformes. Une espèce rare, absolument pas protégée. À nous de la défendre, bec et ongles »(5).
Et, au centre de tout ça : l’inévitable Catherine Weil-Sinet, veuve de Bob Siné, directrice du journal depuis la mort du dessinateur en mai 2016, ainsi que de la société éditrice du journal, les Éditions du Crayon. Une femme adulée de toutes parts, et dont, d’un documentaire de « 28 Minutes » sur Arte(5) au Bondy Blog(6), on vante sans relâche les inestimables qualités de ténacité, de tendresse et de rejet de toute forme d’injustice, tant elle a la gauche chevillée au corps.
La portrait hagiographique, si ce n’est soviétique, que lui a consacré Éric Favereau pour Libération(7) vaut son pesant de brosse à reluire. On y découvre une femme « magnifique dans son bureau près de la Bastille. Resplendissante, grande et blonde avec ce sourire en cascade et ce regard généreux, [elle] triomphe, même si elle déteste toutes les flagorneries » -on suppose donc qu’elle n’a pas dû beaucoup aimer cet article. Et ça continue : « Catherine a donc remplacé Bob, que l’on ne remplace pas. D’ailleurs, on ne remplace pas Catherine non plus, avec sa vie ahurissante, bourrée de coups d’éclats et de liberté effrénée » ; « Catherine n’a jamais changé. Inclassable, séductrice, détestant les opportunistes et les lâches ».
Et qui se se réjouit de son succès, avec « des chiffres de vente entre 16 000 et 20 000 exemplaires en kiosques chaque mois », avant de résumer la situation -en 2018- : «Deux enfants, deux petits-enfants, et on fait travailler 50 personnes.» « On le devine, conclut Libé, Catherine Sinet est comme Bob, nullement prête à s’arrêter ». Siné, dans un texte de décembre 2015 cité plus haut dans l’article, rend d’ailleurs hommage à cette mama bienveillante sans qui rien de tout cela ne serait semble-t-il possible : « Elle mijote, chaque mois, le canard en évitant trop les navets. […] Elle veille sur nous tous avec une attention jamais démentie, toujours aux petits soins, nous protégeant et nous chouchoutant un max ! Sa famille, c’est sacré, nom de Dieu ! Pas touche ! Gare ! Elle griffe ! Elle mord ! Elle déchire ! »
Y compris les personnes salariées qu’elle est censé protéger ? Car derrière ces lignes complaisantes (où l’on entend bien que c’est l’amour qui parle, quoique certes moins qu’à Libé), se cache une réalité plus complexe. Ainsi que nous l’affirme, dans un tout autre son de cloche, une personne témoignant de son arrivée à la rédaction : « J’ai eu la chance en arrivant, d’être mise en garde tout de suite par mon prédécesseur, et par plusieurs de mes collègues de l’ambiance détestable au sein du journal. Cela m’a aidée à me protéger et à observer les comportements des uns et des autres, à prendre du recul, à savoir à qui je pouvais me confier, ou non ». Une autre l’affirme : « En quelques mois, j’ai largement eu le temps d’être traumatisée… » Et durant tout le temps qu’a duré cette enquête, toutes les personnes connaissant le mensuel de l’intérieur, mises au courant de mon travail, m’ont dit : « Je me doutais bien que ça sortirait un jour… » « Oh ben oui, Catherine est assez hardcore, ça m’étonne pas », a par ailleurs dit un contributeur du journal à un·e témoin lui ayant fait part de la dureté des conditions de travail et de sa décision de démissionner. On parle donc d’un secret de polichinelle. Mais quel est-il précisément ?
Le journalisme indé’, entre précariat assumé et précariat subi
Catherine Weil-Sinet se vantait de faire travailler 50 personnes, ce qui est très bien. Mais encore faut-il voir dans quelle conditions et, selon les témoignages que nous avons pu recueillir, c’est là que le bât blesse. Quand on lui demande quels sont les avantages à bosser dans le journal, Sacha* nous répond : « On m’a toujours fait comprendre qu’il n’y avait pas de quoi me payer plus que le SMIC, comme si je devais aussi donner de ma personne et me sacrifier pour cette petite famille de Siné Mensuel, comme si on avait élevé les poules ensemble alors que je me faisais maltraiter. Aucun avantage particulier (à part le journal gratuit, youpi). Pas de tickets resto ». Sachant, s’il est utile de le préciser, qu’un SMIC à Paname, c’est compliqué… Sollicitée sur ce point, Mme Weil-Sinet confirme qu’avant Natacha, mentionnée plus loin, ce poste était effectivement au SMIC, mais nous affirme également que le salaire le plus élevé du journal s’élève à 3 000 euros -brut, supposons-nous (une piste pourrait donc être de lisser les salaires ?).
Et ici, il convient d’ouvrir une brève parenthèse. À Mouais, revue fauchée, majoritairement bénévole -cette enquête de plus d’un an ne me rapportera pas un centime en poche-, sans publicités et (pour le moment) sans aides autres que abonnements et donations, nous avons bien conscience que le manque d’argent est un problème majeur et récurrent dans l’écosystème des médias indépendants, que nous connaissons bien, faisant entre autres partie des co-fondateurices du Syndicat de la Presse pas pareille (SPPP).
Les difficultés financières de Siné Hebdo, puis Mensuel, sont de notoriété publique, et occupent d’ailleurs étrangement une grande partie de la fiche Wikipédia du journal, qui détaille par le menu ses mésaventures -qui furent toujours réglées par d’importantes donations : « En octobre 2013, le mensuel lance un appel aux dons pour ne pas déposer le bilan, ce qui permet alors de lever 85 000 euros. […] À la fin de l’année 2014, [le magazine] lance un appel aux dons qui lui permet de récolter près de 160 000 euros fin janvier 2015. Bénéficiant, à son échelle, du soutien solidaire à la suite de l’attentat contre Charlie Hebdo, le mensuel voit ses abonnements augmenter de 65 % sur la même période ».
Et décembre 2022, la générosité du lectorat du journal, et sans doute aussi la diversité de ses soutiens médiatiques, avait à nouveau porté ses fruits, Mme Weil-Sinet pouvant se rengorger en édito : « Au 28 novembre, nous avons reçu 120 056 euros de 1 683 donateurs. […] Qu’ils soient ici chaleureusement remerciés, car ils savent que Dieu ne le leur rendra pas ! Nous, nous les serrons dans nos bras. Un beau paquet d’oseille, mais avant de casser notre tirelire, on va attendre, pour qu’elle soit bien pleine ». Et d’ajouter, après avoir taclé comme de coutume à Siné ces menteurs de politiques si peu transparents sur l’argent qu’ils perçoivent : « On a encore besoin de vos dons pour continuer à faire paraître le journal chaque mois »(8).
Les galères de moula de Siné Mensuel sont donc réelles, et constituent toujours pour nos revues une problématique complexe. Mais -et nous clôturerons ici notre parenthèse avant d’entrer dans le cœur du sujet- il est toujours possible, de façons diverses, d’éviter que les petites mains du journalisme indé’ se voient, pour la cause, contraintes au martyre. La précarité assumée -pour raison militante, existentielle, philosophique- n’est pas la précarité subie -celle qui nous tiraille et nous fait pleurer, d’autant plus quand elle nous est imposée au nom de principes humanistes -, et je ne saurais ici assez conseiller la lecture de Te plains pas, c’est pas l’usine. L’exploitation en milieu associatif, de Lily Zalzett et Stella Fihn, aux éditions Niet.
« FUIS. MAINTENANT, CAMARADE. TANT QU’IL EST ENCORE TEMPS »
Sacha* a travaillé à Siné, dans les locaux de la rue du Faubourg Saint-Antoine, dans le XIème. Le moins que l’on puisse dire est qu’iel n’en garde pas un souvenir impérissable. Iel a quitté ses fonctions au bout de six mois seulement, « principalement à cause d’un mal-être généralisé à force d’être traité·e comme un·e domestique de château qui a quémandé du travail, de devoir exécuter des ordres absurdes et supporter les sautes d’humeur de la patronne au risque d’être insulté·e, et qui doit en plus s’estimer heureus·e d’être payé·e au SMIC ». Les choses sont d’ailleurs restées difficiles jusqu’au bout. « J’ai entendu des choses dites sur moi par la suite, et ne peux pas dire lesquelles car je ne veux pas mettre en difficulté les personnes qui m’en ont parlé… Mais à la fin de mon contrat j’ai attendu un certain temps mes indemnités et mon dernier salaire. J’ai entendu qu’on m’avait accusé·e d’avoir mis le journal « dans la merde » alors que je ne renouvelais pas mon CDD faute de meilleure proposition de contrat… Mais en revanche le retard du versement de mon dernier salaire, moi, me mettait vraiment dans la merde ».
Selon iel, c’est dans toute la rédaction que règne cette ambiance délétère, quoique à des degrés divers. « Les personnes de « l’administration » étaient souvent méprisées, car ce sont des petits employés qui ne comprennent rien a priori à la presse ou à la politique. Les dessinateurs et chroniqueurs sont bien sûr absents des bureaux, mais ils sont extrêmement bien traités par mail et par téléphone. Le secrétaire de rédaction et la journaliste permanente subissaient toutes les sautes d’humeurs de la patronne et devaient parfois se battre pour ne pas laisser passer des énormités (titrages, sujets, titres d’articles…)». Mme Weil-Sinet reconnaît quant à elle qu’elle « a pu être désagréable », mais de façon très ponctuelle selon elle.
C’est Sacha* qui est l’autrice du « Tuto » à l’origine de cette enquête. « Apparemment il n’a pas été suivi d’effet, puisqu’ils recrutent à chaque fois les personnes super en galère, pour être sûrs qu’on ne bronche pas… » Iel y détaille par le menu, avec un ton mordant et un humour certain, la quantité de travail que représente ce poste peu rémunéré, qui nécessite de cumuler de nombreuses tâches parfois ardues.
Que faut-il donc faire ? Utiliser le logiciel Aboweb, destiné à gérer les abonnements. « C’est assez complexe ». WordPress, « là aussi très complexe ». La difficulté de la gestion des réseaux sociaux « tient au fait que tu es censé être libre dans la publication des contenus, mais qu’en fait tu ne l’es pas du tout » Mettre le logo Siné Mensuel sur tous les dessins dans Photoshop : « J’espère que tu sais te servir de Photoshop, sinon tu as vraiment roulé Siné Mensuel dans la farine de ton recrutement ». Recopier des articles du journal dans des articles WordPress « mais pas en entier bien sûr, sinon tu seras accusé de donner le journal à l’œil ». Être attentif aux commentaires, « sans pour autant être modérateur, c’est-à-dire faire semblant de les lire, car tu n’auras pas le temps d’éplucher 394 commentaires par jour, sauf si bien sûr tu as des super pouvoirs, mais dans ce cas qu’est-ce que tu ferais encore là ? » Le routage, « qu’il ne faut rater sous aucun prétexte, car la livraison du journal aux abonnés dépend entièrement de cette tâche complexe, laborieuse et stressante ». Diverses impressions à réaliser, mais « sur les créneaux d’absence de la rédaction, parce que l’imprimante fait du bruit. Je te conseille de tester un jour en leur présence juste pour te faire incendier, et tu n’oublieras plus jamais »…
La liste continue, prenant un ton kafkaïen, présentant tout un ensemble d’activités ingrates, solitaires, à exécuter tout en se sentant « inutile, mis à l’écart, sans aucun sentiment d’appartenance au journal ». Puis soudain, cela s’arrête. « Je commence à fatiguer de mon tutoriel, que je ne vais pas terminer, finalement. C’était une initiative due à ma conscience professionnelle hors du commun, mais je viens de me souvenir que j’ai été traité·e comme de la merde, et que mon solde de tout compte sera payé avec du retard, ce qui décale mes droits au chômage alors que j’aurai seulement un demi mois de salaire ». Arrive la conclusion. « Ce poste, aussi alléchant qu’il puisse paraître de par sa glamouritude et sa rédaction très engagée à la gauche du caviar, te donnera un coup supplémentaire dans ton estime de toi déjà en train de disparaître […] FUIS. MAINTENANT, CAMARADE. TANT QU’IL EST ENCORE TEMPS ».
De la difficulté de mener à bien ce genre d’enquêtes
Dans la vie de journaliste, il y a de bons moments : savoir que l’on a permis de visibiliser des personnes dans une situation difficile, voir son travail partagé et louangé par quelqu’un que l’on admire, les apéros avec les copaines-collègues… Et les moins bons moment. Apprendre, dans la dernière ligne droite d’une longue enquête, qu’un·e témoin ne souhaite plus apparaître, même anonymement, dans l’article, en fait partie.
Et c’est donc, alors que ce reportage était pour ainsi dire presque terminé -ne manquait que le contradictoire, et le témoignage d’une autre personne ayant dit « oui », puis aucune nouvelle, puis « oui » à nouveau, puis aucune nouvelle, et ainsi de suite, ce qui fait également partie des moments difficiles de notre boulot- ce qui vient de m’arriver. Parfois, la pression est trop forte. Les personnes craquent. Je l’ai vécu, pour une enquête sur les conditions de travail à l’hôpital de Nice. Pour une autre, sur les policiers venant en aide aux personnes migrantes. Car parler, parfois, surtout sur des sujets sensibles, expose. Intimide. Met en insécurité. Et il est bien compréhensible que cela puisse mener à renoncer, tout simplement.
Je viens donc à l’instant de supprimer un nombre important de signes de témoignage sur le sentiment d’oppression de la part de « Catherine », de la fatigue de multiplier des activités n’ayant rien à voir avec le job de gestion d’abonnement -gestion du site internet, community manager, assistant de la rédac’, gestion des archives de Siné…-, des burn-out, et, comme pour tous les autres, des tâches au service personnel de l’intraitable et parfois peu amène maîtresse des lieux, nous y reviendrons plus loin tant il s’agit d’un des nœuds du problème.
Retenons donc seulement ici ce que sur quoi je concluais ce passage : l’amertume qui ressort, chez la plupart des personnes ayant travaillé à ce poste, face à l’hypocrisie de subir ces conditions de travail selon elles fortement dégradées, tout en voyant le journal défendre chaque mois les belles et nobles valeur de la gauche pour-de-vrai, qui ne tolère aucune injustice. Le journal se permettant ainsi de faire une couverture en novembre 2021 sur les bas salaires, ou Mme Weil-Sinet un édito sur l’affaire Nobili (9) au Canard…
Dans cet édito de mai 2023, « Siné Mensuel déplume Le Canard », on peut lire Mme Weil-Sinet s’en prendre à ce journal « qui se veut irréprochable. Irréprochable ? Quid des dizaines de pigistes qui travaillent régulièrement, voire chaque semaine, et dont les papiers sont soit signés par leur chef de service, soit «Jérôme Canard», soit pas du tout. Non, non ce n’est pas une blague. Et bien entendu payés au lance-pierres ». Car payer des anonymes au lance-pierre, à Siné, ce n’est pas le genre de la maison. Et de conclure : « Christophe Nobili, délégué syndical, a été mis à pied sans solde le 2 avril. La classe ! Le canard était boiteux depuis fort longtemps, dorénavant, il est dans la merde ». Un bel exemple de schadenfreude.
« J’ai été mieux traitée dans des boites tenues par des patrons de droite… »
Sauf.. qu’il se trouve qu’être virée sans réel motif juste parce que l’on dérange la direction, c’est précisément ce qui est arrivé à Natacha à Siné Mensuel. « La classe » ?
Natacha était chargée des abonnements, du site internet et des réseaux sociaux depuis le 13 mars 2023. D’abord embauchée en CDD pendant 3 mois, elle signe un CDI en juin 2023. Puis les choses se compliquent. « J’ai été licenciée par la direction de Siné Mensuel. Mon contrat s’est arrêté le 27 novembre 2023, et j’ai été dispensée de travailler à partir du 16 novembre ». « À cause de leur comportement et de mon licenciement, j’ai été diagnostiquée en épuisement professionnel, et la médecine du travail m’a recommandé 4 jours de télétravail par semaine à partir du 24 octobre 2023 ».
Le motif de ce licenciement (intervenant 1 mois avant le délai de 8 mois permettant de bénéficier de l’ancienneté -mais « suffisamment pour qu’elle ait droit au chômage, car j’y tenais », a tenu à ajouter Mme Weil-Sinet dans un appel qu’elle m’a fait ce matin. Dont acte.), dont nous avons pu consulter le compte-rendu de l’entretien préalable ? « Fin août, j’ai lancé les mises à jour du back-office du site internet du journal, et l’une d’elles a fait planter le site pendant quelques jours ». Selon elle, « c’est un accident qui peut arriver à n’importe qui, et pour lequel j’ai servi de bouc émissaire ».
Dans l’échange de mails retraçant cette affaire, auquel nous avons pu accéder en intégralité, sa bonne foi et l’absence de faute de sa part et, a contrario, la négligence de la direction, semblent pourtant manifestes. Une consultante extérieure y affirme bien que cet incident, faute de changement de fond en comble du site, devait fatalement arriver. Et procéder à ces mises à jour faisait bien partie des prérogatives de Natacha, inscrites sur sa fiche de poste. « Ils ont refusé pendant des mois ma proposition de moderniser le site internet, arguant que cela coûtait plusieurs milliers d’euros. Or, après le bug du mois d’août, ils ont changé d’avis, et ont embauché un développeur extérieur pour 6 500 euros… ».
Pour Natacha, la réalité derrière son licenciement est donc à chercher ailleurs. « Des échos que j’ai eus par les personnes m’ayant précédée sur ce poste, je suis la seule à avoir pu négocier autre chose qu’un Smic en total présentiel ». Et donc, selon elle, « la vérité, c’est que la direction de Siné Mensuel, à savoir Olivier Landau (gérant) et Catherine Sinet (salariée-gérante) ont cherché un prétexte pour se débarrasser de moi car j’ai mis en question leurs décisions et leur autorité, notamment en négociant mon CDI à mon avantage, avec une augmentation, deux jours de télétravail par semaine, et j’ai refusé certaines tâches ajoutées à ma fiche de poste, notamment l’assistance à Mme Sinet et la vente du journal sur les manifs et événements, car il n’y avait aucun cadre légal entourant cette tâche « stand sauvage », aucune formation ni anticipation de potentiels dangers…(10) ».
Sollicitée sur ce point, Mme Weil-Sinet maintient la nécessité de la mise à pied de Natacha, pointant quant à elle son manque de compétence (sic) et son comportement.
Natacha poursuit en nous décrivant elle aussi l’ambiance particulière de cette rédaction, où les petites mains se sentent souvent bien seules. Elle l’affirme : « J’ai été mieux traitée dans des boites tenues par des patrons de droite… Entre salariés, nous sommes solidaires. Mais Catherine Sinet et Olivier Landau -dont, encore à ce jour, je ne sais pas trop ce qu’il fait au sein du journal- rendent le travail insupportable. Ils font passer leur ego et leur autorité avant l’intérêt collectif. Au quotidien, Catherine demande, voire ordonne, des choses qui ne sont pas urgentes, ou pas logiques, ou pas sur ma fiche de poste -scanner un article de Paris-Match qu’elle pourrait lire en ligne, envoyer ses résultats médicaux, gérer les colis persos qu’elle se fait livrer au journal… Souvent ses mails sont incompréhensibles. Cela nous retarde. A vrai dire, on travaille mieux en son absence. Elle nous interrompt sans cesse. Elle est souvent désagréable, voire agressive, et entend qu’on s’exécute à la seconde où elle a donné un ordre, sans se soucier des urgences du moment ».
Après cette expérience pour le moins pénible, elle ne peut que le constater : « Ce poste est destructeur, surtout pour une personne qui arrive avec plein de bonnes intentions, la croyance de travailler dans une entreprise de gauche, et la motivation d’améliorer les choses et d’aider le journal à se vendre davantage ». Selon elle, « des gens sont prêts à être payés peu en croyant que c’est pour aider un journal qui va mal, mais en réalité la direction de Siné Mensuel cherche des personnes vulnérables, pour en faire des larbins. Personne n’est sorti indemne de son expérience à Siné Mensuel. L’un des slogans du journal est « ni dieu ni maître ». Il devrait plutôt être « faites ce que je dis, pas ce que je fais » ».
Catherine Weil-Sinet, une « patronne de gauche » ?
Une chose, on le constate, revient dans l’intégralité des témoignages recueillis : le comportement pour le moins problématique, avec ses « subalternes », de Catherine Weil-Sinet, directrice de publication « vêtue de noir mais drapée dans ses yeux clairs et son sourire lumineux » (BondyBlog, 30/10/19) mêlant allègrement sa vie personnelle et la vie du journal. Quitte à dépasser certaines bornes, ce qui est parfois douloureusement vécu par les salarié·e·s devant se mettre à son service, supportant ses lubies et sautes d’humeur.
Il est ainsi question de la servir dans des tâches personnelles sans grand rapport avec Siné. Natacha nous rapporte avoir repéré « les red flags (signaux d’alerte) de la fiche de poste proposée pour mon CDI, comme l’assistance à Catherine. Je savais que ça voulait dire être corvéable à merci pour elle, quitte à travailler chez elle pour son intérêt propre, aux frais du journal…»
Sollicitée sur ce point, Mme Weil-Sinet reconnaît tout au plus que « deux, trois fois » des salarié·e·s ont pu aller chez elle pour « scanner des dessins », mais affirme avoir remboursé le journal. Elle nie le fait que les diverses activités annexes demandées à son service ne soit liées à l’activité de Siné -mais son ressenti ne semble pas correspondre à celui des salarié·e·s… Et « l’assistance à Catherine Sinet » apparaît bien noir sur blanc sur la fiche de poste consultée.
Quant à Sacha*, iel ne tarit pas sur les vexations imposées par Mme Weil-Sinet, dont le caractère… difficile se manifeste de façons diverses. « Il y a d’abord un manque de respect dans la façon de parler. « Eh ! Toi ! » Des signes de la main à la Godfather pour venir la voir. Le fait qu’elle demande un café comme ça, comme si c’était naturel. La première fois, j’ai eu le malheur de mettre un sucre dedans -elle m’avait demandé avec un sucre, quoi. Elle m’a très mal regardée, et sans même me parler, elle m’a fait un signe comme quoi je pouvais aller me faire foutre avec mon café si j’avais mis le sucre dedans, et pas à côté de la tasse. Le pire, c’est que je suis allé·e lui refaire un café sans le sucre dedans… pour lui re-apporter… »
Iel mentionne aussi des réactions peu cordiales à certaines situations. « Quand j’ai été cas contact pendant le Covid, elle m’a appelé en furie : « Et comment tu t’es chopé ça, hein ? Vous êtes allé·e·s dans des soirées avec [nom d’une journaliste] ? Je vous avais dit de pas vous parler de trop près ! » Alors que j’étais juste cas contact, et que mes tests étaient négatifs… En télétravail, elle me harcelait au téléphone parce qu’apparemment elle soupçonnait tout le monde de pas en foutre une, ça la rendait folle ».
Elle se souvient également d’une « blague » notée dans son carnet de l’été 202*, alors qu’il lui a été interdit de partir même quelques jours. « Catherine : Bah tiens, comme t’es tout·e seul·e, tu pourras faire des blagues sur Facebook du genre « tout le monde est parti en vacances et moi là je suis tout·e seul·e ». En effet, c’est super drôle… ». « Elle instaure un climat étrange en insultant les gens par derrière, mais les autres entendent. Ils sont donc témoins de ce qu’elle pense des autres. Ça pose l’ambiance ».
Mais difficile d’écorner une telle idole. Nombreuses sont les personnes capable, même sans réellement la connaître, de la défendre bec et ongle. Quelque chose que j’ai pu moi-même expérimenter un soir d’été à Paris, lorsqu’une consœur journaliste, lancée sur ce sujet, m’a presque supplié de ne pas m’en prendre à une personne aussi objectivement merveilleuse.
« L’argent est très mal dépensé »
Merveilleuse, mais visiblement pas quant il s’agit de gérer les finances d’un journal qui chaque année crie misère.
Natacha : « Le journal survit grâce aux aides publiques [23 000 euros l’an passé selon Mme Weil-Sinet à qui nous avons posé la question, NDLR], et aux campagnes de dons. Mais l’argent est très mal dépensé. La direction cherche à faire des économies sur ce qui est indispensable, comme les salaires, mais dépense sans compter pour des choses moins utiles -surabondance de coursiers, de taxis, de services inutilisés mais payés quand même, comme un abonnement à une newsletter qui n’a pas été envoyée pendant 9 mois (200 à 300 euros par mois)… Elle refuse de proposer les tickets-restos, malgré les aides possibles qui réduisent le coût. Et, systématiquement, pour le poste de chargé des abonnements et réseaux sociaux, ils proposent le SMIC sur 13 mois, alors qu’il s’agit d’un poste 2-en-1, voire 3-en-1… [Mme Weil-Sinet affirme que ceci est faux, mais la fiche de poste semble bien infirmer sa dénégation] Les seuls qui sont bien payés sont les dessinateurs -120 euros un dessin, 200 une demi-page, 500 une pleine page ou Une ».
Tous les témoignages donnent ainsi à voir une gestion pour le moins étonnante des finances d’un journal pourtant, nous l’avons vu, souvent bien dépourvu quand la bise est venue. « J’ai appris que durant le confinement en 2020, Catherine a refusé que les salariés soient en télétravail, et a préféré faire payer le taxi par le journal à tout le monde pour que les gens soient sur place… »
Elle conclut : « Ils sont globalement négligents. Encore aujourd’hui, l’actuel chargé administratif découvre des irrégularités dans la comptabilité. Enfin, Catherine et Olivier travaillent toujours à 80 ans, sans en avoir besoin ni être indispensables au journal (au contraire). S’ils voulaient faire faire des économies au journal, ils prendraient leur retraite (elle touche 1 000 euros de salaire, lui 500 euros) ».
Connaître « le côté des oppressé·e·s », entendre leur parole
Peut-être que certaines personnes trouveront que rien de tout cela ne relève du pénal -ce qui est vrai- et qu’il est normal, ou à tout le moins inévitable, que dans un média indépendant de moyenne audience ne roulant pas sur l’or les conditions de travail soient difficiles -et que les luttes défendues valent bien que des salarié·e·s subissent les lubies de la patronne, qu’on pardonnera pour services rendus à la cause. Ce n’est pas, et ne sera jamais le point de vue de notre revue -anarchiste, rappelons-le.
Là-bas si j’y suis, récemment le Monde diplomatique (« Surprofits, précariat et antisyndicalisme au “Monde diplo” », Loris Guémart, Arrêt sur Images, 13/02/23), ou encore Blast (« “Blast”, où l’on souffre de l’info », Alizée Vincent, Arrêt sur Images, 19/06/23) -et Denis Robert n’en est pas à son premier coup d’essai-, trop nombreux sont les médias « pas pareils », selon la formule de feu le Ravi, et défendant sur le papier les victimes de toutes les oppressions, à pratiquer dans les faits des méthodes de gestion tristement capitalistes. Ceci doit nous alerter, et ne saurait souffrir aucune complaisance au prétexte « qu’on ne tape pas sur les copains ».
Comme nous le dit Sacha* à la fin de son témoignage, « en gros, Siné Mensuel, c’est une imposture ». Et de narrer une anecdote. Un jour, elle « alpague » des contributeurices connu·e·s du média « dans une soirée », et leur fait part d’un autre point de vue sur le journal dans lequel iels écrivent des chroniques. « Je me dis que je ne suis personne, que ma parole peut être soupçonnée d’être exagérée pour me faire remarquer, qu’on peut croire que je surinterprète des trucs parce que je suis un·e petit·e employé·e… » Néanmoins, la première lui rétorque : « Ça ne m’étonne pas »... « Je sais que c’est une personne sérieuse, que ça peut lui avoir mis la puce à l’oreille, qu’elle m’a sûrement crue … Je ne sais pas si elle a écrit dans Siné Mensuel depuis » (oui). Mais « en vrai, je sais que Catherine a plus de poids et d’envergure, et qu’on a envie de la suivre, en souvenir du bon vieux Siné aussi… » La seconde personne, « elle, a été très surprise, curieuse, intéressée, ça m’a réchauffé le cœur. Mais quelques jours plus tard, elle a partagé une story en soutien à Catherine Sinet… »
Iel ajoute : « Je sais bien qu’en l’absence de « preuves » autres que des témoignages, c’est compliqué. Mais moi, quand des meufs ont dit avoir été harcelées pendant leur années d’études par Hugo Clément, je les ai crues. Et j’ai arrêté de suivre ce mec. C’est tout. Quand on connaît le côté des oppressé·e·s, on ne peut pas faire pas comme si de rien n’était. Question de valeurs … de gauche ? Bonne question ! » Et de conclure, dans un autre échange quelques temps plus tard : « Tout le monde dit « ça m’étonne pas ». Mais alors si ça n’étonne personne…. comment on fait… ? Bah on fait rien. On laisse les signalements s’accumuler à la médecine du travail, jusqu’à ce quelqu’un craque vraiment, du genre … grave. Et là, est-ce qu’on dira qu’on savait tous, que ça nous étonne pas ? C’est pour ça que j’ai écrit ce tutoriel, pour notre santé mentale. Parce que la solidarité entre nous, les victimes de tout ça, c’est ce qui personnellement m’a sauvé·e. Il nous arrive encore de nous retrouver entre nous pour en reparler… ça crée des liens forts d’avoir vécu ça ensemble, même de manière séparée ».
L’un des emblèmes de Siné est le chat noir -comme nous. Fidèle à ce symbole anar’ entre tous, nous n’avons voulu, dans cette enquête, que mener à bien l’un des principes qu’il présuppose, à savoir, donner voix aux sans-voix. Nul doute que la rédaction du média dont le dernier numéro en date, à l’heure où j’écris, comprenait un article titré « salaires, le grand bond en arrière », ne nous en tiendra pas rigueur. Ni dieu, ni maître -ni « larbins ».
Par Mačko Dràgàn
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* Le prénom a été changé et nous l’avons volontairement dé-genré.
(1) Daniel Mermet ou les délices de « l’autogestion joyeuse », par Olivier Cyran, 26 juin 2013
(2) https://www.arretsurimages.net/articles/chez-la-bas-daniel-mermet-ecrase-les-grevistes
(3) Wikipédia, « Affaire Siné » : « L’affaire débute le 2 juillet 2008 avec une chronique de Siné parue dans l’hebdomadaire Charlie Hebdo. Le dessinateur y critique l’arrivisme de Jean Sarkozy, fils du président nouvellement élu, Nicolas Sarkozy. Il s’y moque particulièrement de la possible conversion au judaïsme de Jean Sarkozy. Le 8 juillet 2008, lors d’une émission sur RTL, le journaliste Claude Askolovitch qualifie au micro cette chronique d’« antisémite dans un journal qui ne l’est pas », engageant ainsi la polémique. Le directeur de la publication du journal, Philippe Val, annonce alors au dessinateur son licenciement ». Siné a été relaxé. La polémique a cependant fait ressortir une archive… gênante, une émission de 1982 à la radio Carbone 14 où l’on entend le dessinateur, à l’évidence totalement beurré, déclarer : « On en a plein le cul. Je veux que chaque Juif vive dans la peur, sauf s’il est pro-palestinien… Qu’ils meurent ! Ils me font chier… Ça fait deux mille ans qu’ils nous font chier… ces enfoirés… Il faut les euthanasier… Soi-disant les Juifs qui ont un folklore à la con, à la Chagall de merde… » etc.
(4) https://mouais.org/dire-au-monde-qui-il-est-entretien-avec-guillaume-meurice/
(5) https://actualitte.com/article/108549/presse/l-appel-a-sauver-sine-mensuel-la-satire-contre-vents-et-marees
(5) https://www.arte.tv/fr/videos/115698-001-A/catherine-weil-sinet-ou-l-art-de-chier-dans-les-begonias/
() https://www.bondyblog.fr/culture/rire-ecrire-et-lutter-voila-catherine-weil-sinet/
(6) www.liberation.fr/france/2018/11/07/catherine-sinet-en-vie-de-rire_1690604/
(8) https://www.sinemensuel.com/edito/dans-nos-bras/
(9) Christophe Nobili, lanceur d’alerte et délégué syndical, a été renvoyé par le Canard Enchaîné avec avoir fait état de ses soupçons d’emploi fictif au sein du journal.
(10) Il ne sera pas ici inutile de rappeler que des incidents ont déjà eu lieu. Lire notamment : 1er mai. Le stand de Siné Mensuel détruit sur la manifestation à Paris, l’Humanité, 02/05/23 : « Le spectacle est désolant : des exemplaires de Siné-Mensuel jonchent le sol, derrière une vitre brisée en mille morceaux, après des affrontements entre le black bloc et la police. »
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